Goûter Barcelone

Munie de mon sac à dos et d’un féroce appétit, me voilà à Barcelone. Objectif : la Boqueria et le marché de Santa Caterina, Mecque de la gourmandise.

Mon premier matin à Barcelone, et la première chose que je fais au réveil, c’est de sortir sur le balcon pour contempler la vue de la longue rue étroite qui s’étend en bas. Il fait frais, mais entre les lignes des toits se découpe le bleu lumineux du ciel. La lumière scintille sur les pavés tout justes lavés, donnant comme un contre-jour sur les silhouettes qui marchent sous le regard des gargouilles et des gigantesques lampes en fer forgé. Des balayeurs, des livreurs de ci de là, avec leurs chariots pleins à ras-bord, quelques fêtards encore sous l’emprise de diverses émanations de leur nuit blanche, se fondant parmi la foule pressée qui se précipite pour arriver à l’heure au travail.

Munie de mon sac à dos et d’un féroce appétit pour déguster Barcelone, je descends me joindre à la mêlée, traversant le quartier gothique, passant devant des cathédrales toutes plus raffinées les unes que les autres, placetas et cafés, en zig-zaguant dans une foule de plus en plus dense. Je continue sans m’arrêter dans les boutiques qui appellent à la tentation et renonce même à un café devenu à ce stade presqu’indispensable. Je me dirige tout droit en direction de la célèbre Boqueria. J’aperçois son entrée juste à côté de la Ramblas, une impressionnante arche en métal ornée de vitraux aux couleurs chatoyantes m’attire. Un courant de gens m’emporte et nous nous déversons dans un immense espace couvert, où la foule que nous sommes, serrée les uns contre les autres, reste bouche bée devant cette Mecque de la gourmandise.

Oh nos bouches impatientes ! Par où commencer ?

 

C’est ahurissant. Plus de 2,500 mètres carrés accueillent au-delà de 300 stands dans ce labyrinthe d’étalages éblouissant. Il y a des piles de fruits et légumes aux couleurs vives, des déploiements de poissons luisants aux côtés de crustacés sur lits de glace., D’odorants jambons et saucissons secs pendent au bout de ficelles rouges, tels des notes de musique venant d’une chanson qui attend d’être chantée. Des monceaux de somptueuse soubressade ne demandant qu’à être tartinée, des œufs de toutes les tailles et de diverses couleurs, soigneusement disposés dans de jolis paniers, des feuilletés d’empanadas tièdes, de petites pâtisseries sucrées, d’énormes meules de fromages, des paniers géants de fruits secs et à coque à ramasser à la louche et au kilo, de fabuleuses olives juteuses aussi grosses que des œufs de Pâques, et des jus de fruits multicolores fraîchement pressés me mettent l’eau à la bouche…et j’en passe !….

 
 

Que goûter en premier ?

Que goûter en premier ? Je suis freinée par une indécision qui me paralyse autant par la vue alléchante de ces réjouissantes sucettes constituées d’olives les plus vertes et les plus énormes jamais vues, que par ces cubes de Manchego blanc, ces carrés de piments écarlates mis en brochettes verticales…Olà ! C’est parti, 3€, gracias ! C’est tellement goûteux, et cette succulente consistance, c’est salé, sucré, juteux… Puis, mon oeil se pose sur ces jolis petits cônes en papier garnis de fruits de mer tout juste frits : plusieurs mélanges, friture ou petits chipirones, ainsi que les plus minuscules et les plus croustillants calamars frits. Mon choix se porte sur les chipirones agrémentés d’un jet de jus de citron et une pincée de sel de mer. Mmmmh, quel petit-déjeuner magique ! Mon palais fait tilt, mon appétit se surmultiplie ! Je savoure avec mucho gusto ! Puis je fais le tour des étalages de poissons, admirant le rouge carmin des crevettes. Puis je tombe sur de grosses huîtres venant du sud plus profond. J’avale une tasse d’un lumineux jus d’orange et de grenade. J’aperçois ensuite deux dames qui, en tandem, allient une parfaite chorégraphie pour confectionner de superbes petits sandwiches : l’une tranche délicatement le petit pain croustillant tout juste sorti du four, le passe à l’autre qui elle frotte soigneusement un côté avec une tomate écrasée et très mûre, puis tartine adroitement le côté moelleux d’une fine couche de margarine en y ajoutant la plus mince couche de chiffonnade de jambon…ça a l’air tellement bon.

Emportée par un élan, j’en achète un aussi, mais d’un seul coup je me dis que je dois vraiment partir et vite. Aussi loin que ma mémoire me porte, je crois que je n’ai jamais autant mangé le matin. Je me trouve donc une place dehors au soleil pour dévorer sans merci ce sandwich. Je déteste la margarine et pourtant, avec l’umami de ce jambon et les notes acides et sucrées de la tomate, c’est un équilibre paradisiaque, un accord joué à la perfection.   

Le marché de Santa Caterina

Le lendemain matin, je pars directement essayer le marché Santa Caterina bien moins fréquenté de touristes qui bayent aux corneilles (tels que moi) mais tout aussi beau et stupéfiant. Il y a un bar au long comptoir avec juste une place de disponible, alors je la saisis. Derrière la vitrine, des plats divers et variés attirent mon attention pour que je choisisse…une tâche difficile. Je commande la bacalao. Elle est si merveilleuse que je dois la goûter à nouveau, alors j’en reprends une deuxième portion, avec un verre de blanc, et il n’est même pas encore midi. Je me dis, oui, la vie à Barcelone est juste délicieuse.

Une fois rentrée, je voulus cuisiner cette bacalao moi-même. La chaîne « Spain on a Fork » fournit cette recette en y ajoutant des haricots blancs. Les filets de morue doivent être bien épais, on peut les trouver déjà dessalés sinon faites-les tremper vous-même une nuit entière en changeant l’eau une fois. C’est vraiment très, très simple.

(Sur la photo, je l’ai faite avec une cuillère à soupe de concentré de tomate ainsi que des tomates séchées et du piment en poudre, c’est donc bien plus rouge ! Je n’ai pas trouvé de morue avec la peau, mais c’était néanmoins délicieux).